Tout le reste du pays de Bière, dans la partie que comprend actuellement la forêt de Fontainebleau et même en dehors, n'était formé, dans les sables et les rochers, que de petits buissons ou de bruyères, sans aucun arbre. Certaines plages rocheuses entre Achères et Arbonne sont encore restées dans cet état primitif ; elles présentent l'aspect qu'avaient à cette époque et qu'eurent encore longtemps après toutes les bandes rocheuses de la forêt.

Alors, s'il n'y a guère de vraiment naturel en fait d'arbres peuplant la forêt que les chênes et les hêtres, peut-être les bouleaux, d'où viennent donc toutes les autres essences? Il ne faut pas le dissimuler plus longtemps, ces autres essences, dont certaines sont devenues les plus abondantes de la forêt, et toutes celles qui peuplent les rochers ou les sables, sont semées, repiquées ou plantées par les soins de l'administration forestière.

Supprimez les pépinières de Courbuisson et autres, établies par cette administration ; tout cela disparaîtra au bout de cinquante ans.
Le château de Fontainebleau s'était édifié peu à peu autour de l'emplacement d'un rendez-vous de chasse que Louis-le-Gros avait fait construire près d'une fontaine à l'eau limpide (Fontaine-belle -eau) au milieu de la forêt de Bière. En 1515, sous François 1er, l'intendant du château, probablement sur les conseils des nombreux artistes italiens qu'avait fait venir le roi, eut l'idée de planter des pins maritimes sur un terrain bientôt désigné sous le nom de "Jardin des Pins" et qui occupait la place du jardin anglais actuel. Ces essais ayant réussi, des pins maritimes furent introduits ainsi en grand nombre dans les sables avoisinant les rochers, et, plus tard, ces peuplements artificiels furent multipliés.
Tous ceux qui ont vu la forêt de Fontainebleau avant 1879

se souviennent de ces masses de pins maritimes qui occupaient plus, de 2.ooo hectares, et qui donnaient alors à certaines formations rocheuses l'apparence des paysages de la région des Maures, en Provence.
Les premiers pins maritimes, plantés à l'époque de François 1er, avaient supporté les grands froids de certains hivers au XVIIe siècle et du commencement du XVIIIe ; leurs congénères, plantés en plus grande quantité par M. de Cheyssac en 1785, résistèrent au grand hiver de 1829-1830, mais ils furent détruits, en 1879 et 1880 par suite d'un phénomène exceptionnel. Le terrible verglas de janvier 1879 brisa les branches et les tiges de ces pins qui devaient subir ensuite les froids intenses du mois de décembre de la même année et de janvier 1880 où l'on vit le thermomètre s'abaisser pendant plusieurs jours jusqu'à 30 degrés au-dessous de zéro.