Et cela par la bonne raison qu'il n'y avait pas de caverne. Cette histoire a été entièrement forgée par le Sylvain ; M. Herbet raconte que l'ancien tenancier de la Caverne lui a avoué que c'était lui-même qui avait creusé cette excavation sous le rocher, au début de l'année1845, sur 1es indications de Denecourt. C'est bien le cas de dire que le Sylvain avait inventé "une histoire de brigands".
Faut-il rire ou s'indigner ? Ni l'un ni l'autre ; il faut admirer l'ardeur incroyable de cet homme que rien ne pouvait retenir pour attirer 1'univers entier vers sa chère forêt ; sa passion pourrait-on dire allait jusqu'au crime !
J'ai dit plus haut qu'en se donnant ainsi entièrement à sa conviction, en s'obstinant à vouloir faire connaître à tous jusqu'au dernier détail des anfractuosités rocheuses ou des végétaux remarquables de la forêt, Denecourt devait fatalement se créer des ennemis ; sa ténacité sur le faire triompher de tous.Ce furent d'abord les peintres de Barbizon et autres lieux qui trouvèrent que les travaux du Sylvain

attiraient de nombreux promeneurs venant, troubler leur " vie charmante de commodités bohémiennes "; ils n'étaient plus "chez eux" dans les installations qu'ils s'étaient faites en divers coins de la forêt. Denecourt combattit leurs préventions et les accabla de ses dons moraux en leur dédiant des sites pittoresques, des rochers ou des arbres dont plusieurs font actuellement connaître à la postérité des noms d'artistes qui, sans Denecourt, seraient restés parfaitement inconnus : "Leur œuvre a disparu, mais leur roche survit."
Ainsi convertis aux nouveaux sentiers qui d'ailleurs, dans bien des cas, leur rendirent de grands services, les peintres de la forêt contribuèrent aux frais de l'inscription gravée sur une des parois de la Grotte du Chasseur Noir : A Denecourt, les artistes et touristes reconnaissants, 1852.
Ayant pour lui les peintres, il eut bientôt les poètes et les littérateurs, ainsi qu'en témoigne le Livre des quarante-deux offert au Sylvain en 1855,

et qui renferme des pages inédites de Lamartine, Victor Hugo. Alfred de Musset, Théophile Gauthier, George Sand, Théodore de Banville, Henri Murger, Jules Janin, Béranger, etc. "écrivains de tous les camps, de toutes les nuances littéraires ou philosophiques, réunis sous le même drapeau par sympathie pour l'ami de la nature.".
Un autre ennemi tout naturel, ce devait être l'Administration forestière. Dans son enthousiasme, le brave médaillé de Sainte -Hélène finissait par croire qu'il avait conquis la forêt et qu'elle était devenue sa propriété, qu'il po uvait y tracer des chemins à sa fantaisie, multiplier ses flèches bleues ou rouges, et inscrire, sur les rochers ou les arbres, des chiffres ou des lettres de taille démesurée. Il est vrai que, de 1830 à 1848, 1'Inspecteur des forêts était M. de Bois d'Hyver